( AFP / PATRICIA DE MELO MOREIRA )
Le fonds américain RedBird a annoncé vendredi retirer son offre de 500 millions de livres (565 millions d'euros) pour prendre le contrôle du quotidien britannique The Telegraph, replongeant la prestigieuse publication conservatrice dans l'incertitude.
"RedBird a retiré aujourd'hui son offre d'achat du Telegraph Media Group", a indiqué un porte-parole du fonds, sans autre explication.
"Nous restons pleinement convaincus que le Telegraph et son équipe de classe mondiale ont un bel avenir devant eux, et nous travaillerons dur pour aider à trouver une solution qui est dans l'intérêt supérieur des employés et des lecteurs", a-t-il ajouté.
L'annonce fin mai d'un "accord de principe" pour le rachat du quotidien avait mis un terme à une saga de plus de deux ans, qui avait vu le gouvernement britannique bloquer une tentative de prise de contrôle par un fonds émirati et plusieurs repreneurs potentiels renoncer.
"Ce n'est un secret pour personne que moi-même, tous les rédacteurs en chef et bon nombre de nos journalistes étions préoccupés par cette offre", a réagi rédacteur en chef du Telegraph, Chris Evans, devant les employés, rapporte le quotidien.
"Il est également évident que ce processus a duré beaucoup trop longtemps. The Telegraph mérite des propriétaires qui se soucient du journalisme et qui sont prêts à investir", a-t-il ajouté.
- Fondé il y a 170 ans -
La directrice générale de Telegraph Media Group, Anna Jones, a elle annoncé son intention de "travailler avec le conseil d'administration indépendant sur les prochaines étapes et sur ce que cela signifie pour la future propriété de l'entreprise".
Propriété depuis 2004 de la richissime famille Barclay, le journal, fondé il y a 170 ans, avait été mis en vente d'office fin 2023 par la banque Lloyds pour éponger de lourdes dettes.
Une coentreprise entre Redbird et le fonds d'investissement dans les médias d'Abou Dhabi (IMI), baptisée Redbird IMI, avait d'abord passé un accord avec la famille Barclay et remboursé sa dette en échange d'une option pour prendre le contrôle de l'entreprise.
Mais la perspective de voir un fonds émirati contrôler l'une des publications les plus influentes au Royaume-Uni avait inquiété le gouvernement conservateur britannique, qui avait décidé de légiférer pour bloquer la prise de contrôle de journaux britanniques par des États étrangers. Redbird IMI avait jeté l'éponge.
Le fonds américain, qui a déjà investi en Europe dans des clubs de football tels que le Milan AC ou Liverpool, avait alors offert de devenir actionnaire majoritaire, en gardant IMI comme partenaire mais cette fois avec "une participation passive de 15%", selon le Telegraph.
- Crainte des ONG -
Mais le nouveau consortium risquait malgré tout, toujours d'après le quotidien, de faire face à un examen pour "évaluer la menace que représente l'influence d'un État étranger sur un journal".
Contacté par l'AFP, le gouvernement britannique n'avait pas répondu en début d'après-midi.
Plusieurs ONG de défense des droits humains et de la liberté d'expression avaient aussi alerté la ministre britannique de la Culture Lisa Nandy en août du "risque d'influence chinoise" pesant selon elles sur ce rachat, en raison de liens supposés avec la Chine, démentis par le fonds.
"Les liens de RedBird Capital avec la Chine, notamment par l'intermédiaire de son président, John Thornton, menacent le pluralisme des médias, la transparence et l'intégrité de l'information au Royaume-Uni", avaient écrit ces organisations, dont Reporters sans frontières, Article 19 ou Index of Censorship.
"Nous vous exhortons à empêcher cette acquisition et à initier une enquête" sur une éventuelle influence étrangère, avaient-elles ajouté.
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